Syngué Sabour – Atiq Rahimi

Syngué sabour signifie en persan « pierre de patience ». Jadis existait une pierre magique à laquelle on pouvait se confier : « La pierre t’écoute, éponge tous tes mots, tes secrets, jusqu’à ce qu’un beau jour elle éclate. […] Et ce jour-là, tu es délivré de toutes tes souffrances, de toutes tes peines. »

syngue

Syngué sabour, le goncourt 2008, c’est donc l’histoire
d’une femme qui veille son mari quasi- mourant, ou en tout cas inerte et sous perfusion, soldat d’Allah tombé sous les balles, aujourd’hui « éponge ». Nous sommes quelque part en Afghanistan, dans une ville ravagée par la guerre. La peur est partout, la violence rôde, les balles sifflent régulièrement dans la rue.
D’abord soumise, en prière perpétuelle, elle se rebelle et se révèle peu a peu face à ce mari dont elle ne craint plus la réaction. Avec rage et passion, elle lui hurle ses souffrances de femme dans un Afghanistan absolutiste. Elle lui murmure des choses insensées, des mots qu’elle a tus depuis toujours. Il y a souvent de l’amour, parfois de la tendresse, de la haine aussi, de la colère, des espoirs enfouis… elle lui avoue l’inavouable, s’insurge, insulte ces fous de Dieu et maudit cette terreur religieuse qui l’a rendue martyre de la vie.
Elle prie, elle crie, elle hurle. Elle se libère. Elle s’assassine.

Les mots d’Atiq Rahimi sont simples, mais ils pèsent lourds et touchent au plus juste, en plein coeur. Ils sont la voix de milliers de femmes qui souffrent. « Cette voix qui émerge de ma gorge, c’est la voix enfouie depuis des milliers d’années. » dit-elle à son mari. Il le fait avec gravité et un certain lyrisme et une certaine audace qu’il faut souligner. C’est un magnifique poème, une oeuvre puissante absolument à découvrir.