Chien-loup , le roman sauvage de Serge Joncour

Chien-loup, c’est une histoire formidable. Ou plutôt deux histoires formidables. Deux histoires qui se déroulent dans le Lot au même endroit, l’une en 1914-1915, au début de la 1ere guerre mondiale, l’autre
l’été 2017, quelques mois après l’élection de Donald Trump. Ce dernier détail n’ayant aucune importance dans cette histoire formidable, c’est juste affaire de situer.

Mais surtout, Chien-Loup ce sont deux histoires saisissantes, captivantes, furieuses, dévorantes, passionnantes.

Contraint et forcée par son épouse Lise , une actrice un peu en stand by dans sa carrière, de passer leurs vacances dans un trou paumé du Lot, Franck, un producteur un peu vieille école récemment associé à deux jeunes loups américains , se met à devenir le maître d’un chien-loup débarqué un beau matin devant la maison abandonnée en haut de la colline.
Cette relation va changer sa vie.

Lui, le parisien ultra connecté qui se désole de voir ce lieu sans réseau va apprivoiser l’animal et la nature pour donner un nouveau sens à sa vie.

Au démarrage de la guerre, Wolfgang, un dompteur allemand d’un cirque disparu, décide de venir se réfugier avec ses lions, dans cet endroit sauvage où personne ne vit à l’exception des hyènes, des chevreuils, des sangliers et autres animaux de la forêt. Pendant des mois, il réussit à alimenter ses animaux et à survivre, mais l’amour et la haine des Hommes va perturber ce fragile équilibre.

Biblios a titré : Joncour joue à Shining dans le Lot. La référence est drôle et même s’il n’est pas totalement juste, il y a une tension similaire à celle du film dans ce roman. Une tension qui ne nous lâche pas , ou quasiment pas. C’est un pavé de 475 pages qui se dévore à une vitesse de dingue tellement on a envie de savoir comment vont se terminer ces deux histoires parallèles, qui se chevauchent, se ressemblent, se recoupent.

Dans ce paysage, la sauvagerie est partout, même avec 1 siècle d’écart. C’est une des morales du livre finalement, l’amour et la violence transcendent les époques et les façonnent. C’est une histoire qui invite à réfléchir sur le monde connecté dans lequel nous vivons, mais qui est aussi, paradoxalement, un appel au calme et à la paix intérieure. Et un appel à trouver nos propres refuges, quelqu’ils soient, ou qu’ils soient.

Extraordinaire fable historique et contemporaine, Joncour signe sans doute là l’un de ses meilleurs romans (je n’ai lu que l’Ecrivain national et Repose toi sur moi que j’avais par
ailleurs beaucoup aimé; la preuve ici pour le 1er cité ) et c’est pour moi de nouveau un vrai coup de coeur.

Et même si Joncour rime avec Goncourt, je ne me hasarderai pas à faire un quelconque pronostic (je lis trop peu de livres pour ça) mais j’ai lu de bien moins bons romans lauréats du fameux prix.